
Claire Fuller – Un mariage anglais (2018)
4ème de couv’…
Ingrid a 20 ans et des projets plein la tête quand elle rencontre Gil Coleman, professeur de littérature à l’université. Faisant fi de son âge et de sa réputation de don Juan, elle l’épouse et s’installe dans sa maison en bord de mer.
Quinze ans et deux enfants plus tard, Ingrid doit faire face aux absences répétées de Gil, devenu écrivain à succès. Un soir, elle décide d’écrire ce qu’elle n’arrive plus à lui dire, puis cache sa lettre dans un livre.
Ainsi commence une correspondance à sens unique où elle dévoile la vérité sur leur mariage, jusqu’à cette dernière lettre rédigée quelques heures à peine avant qu’elle ne disparaisse sans laisser de trace.
Mon ressenti de lecture…
Gil est un prof charismatique et bien fait de sa personne. Ingrid est son élève, elle a 20 ans, elle tombe sous son charme. Ce qui aurait pu n’être qu’une amourette décomplexée et passagère débouche sur un mariage… des enfants…
Nous sommes dans les années 70, les années, hippies et bohèmes, les années où les femmes s’affranchissent d’un carcan étriqué… et ce mariage signe un destin loin de la passion des premiers jours…
Terminé les rêves de femme libérée pour Ingrid qui, après l’excitation d’une liaison osée avec un homme plus âgé et son professeur de surcroît, voit son amie Louise s’envoler vers des cieux qu’elle ne connaîtra jamais, toute enceinte qu’elle est… et tout aussi mariée.
Ingrid s’étiole, ne parvient pas à s’épanouir dans sa maternité et décide de se confier à son époux, au travers de lettres cachées dans des romans au titre significatif.
Un jeu de piste sur lequel son cher et tendre s’engagera bien trop tard, avec une sorte de frénésie folle, pour retrouver son épouse ou cacher sa véritable nature à ses deux filles.
Deux filles dont l’une a toujours été lucide sur le couple de ses parents alors que l’autre marche sur les traces de ce père trop souvent absent et idéalement fantasmé. Deux filles présentes pour les derniers temps de ce paternel qui ne vit que pour ses livres…
C’est un roman au ton majoritairement mélancolique sur un amour qui meurt peu à peu de n’être nourri qu’à sens unique. Le portrait d’Ingrid est touchant et triste car l’oisillon n’a pas pris son envol, ses ailes se sont atrophiées peu à peu au nom de l’amour pour un homme. Gil, un homme fantasque et libertin. Au fil des adultères et de ses fausses couches, Ingrid n’a plus d’espoir. Elle n’a que la nage pour se calmer, s’apaiser, se ressourcer. Et puis un jour, disparaître. L’auteur ne nous dévoile pas son avenir. Il est laissé à notre discrétion, nous pouvons imaginer tout et son pendant. A-t-elle retrouvé une sérénité ou un bonheur dans une liberté attrapée d’un geste, un jour. A-t-elle tout simplement disparu dans les eaux profondes pour ne plus jamais rejoindre la plage?
Si la sympathie du lecteur se porte spontanément vers cette femme meurtrie, il n’est pas hermétique au charme et au charisme du jeune professeur-écrivain lors de la rencontre entre Ingrid et Gil. L’auteur dépeint une atmosphère artistique envoûtante, avec des passages sur l’écriture qui ne peuvent que nous parler. On se laisse porter par ses discours et l’admiration s’éteint au fil des pages, des révélations et du temps qui passe et efface ses charmes.
L’intrigue est fine, joue sur l’époque et les personnalités, rebondit sur ces piles de livres qui s’accumulent partout tel un labyrinthe arpentant les silences, les colères, les secrets et les trahisons d’un amour qui ne connaîtra pas l’éternité.
Je n’ai vraiment pas eu de coup de cœur pour ce roman mais il faut louer la plume délicate et élégante de l’auteur et une lecture tout de même très agréable pour l’atmosphère créée par les livres et l’écriture…
Citations…
« Les vérités cachées (…) sont les forces vives de l’écrivain. Vos souvenirs, vos secrets. Oubliez l’intrigue, les personnages, le plan; si vous voulez vraiment être un écrivain, il va falloir plonger les mains, dans la fange jusqu’aux poignets, aux coudes, aux épaules, creuser pour déterrer vos secrets les plus obscurs, les plus intimes. »
« Ce que l’œil ne voit pas et que l’esprit ignore n’existe pas. »
« Tout ce qui compte dans le roman, c’est le lecteur. Sans le lecteur, le livre n’a aucun intérêt, par conséquent le lecteur est au moins aussi important que l’auteur, si ce n’est plus. Mais souvent, la seule façon de savoir ce qu’un lecteur a pensé, ce qu’il a traversé pendant la lecture, est d’observer ce qu’il a laissé derrière lui. Tous ces mots (…) parlent des lecteurs. »
« Écrire ne sert à rien tant que personne ne vous lit, et chaque lecteur voit quelque chose de différent dans un roman, dans un chapitre, dans une ligne. (…) Un livre ne prend vie que lorsqu’il entre en interaction avec un lecteur. Que pensez-vous qu’il se produise dans les creux, les non-dits, dans tout ce qui n’est pas écrit? Le lecteur comble les vides avec sa propre imagination. »
« (…) je commence à penser que c’est parfois mieux de savoir, d’une manière ou d’une autre. (…) je crois que ce n’est pas forcément bon d’avoir une imagination plus vivante et plus grande que la vie elle-même. »
« Une mère ne quitte pas ses enfants.
– Qui a décrété une chose pareille? (…) Des pères quittent leurs enfants tous les jours et personne ne bronche (…). Pourquoi serait-ce si choquant que pour une fois ça vienne d’une femme? »
Un peu le style des « Les apparences » de Gylian Flynn… suis pas sûre de l’ortho de l’auteure. Là, j’avais été menée par le bout du nez 😆
Bon, je garde la note sous le coude, mais je pense plus le passer que le lire.
Je connaissais « braquage à l’anglaise » (à l’italienne aussi), mais pas le mariage 😉
Peux pas dire, je n’ai pas lu le bouquin en question! 😉
Tu devrais, il est super extra génial !
Mea culpa, il est enfoui dans ma PAL! Je le note! :p
Bonnes fouilles !
Ahah, thanks! :p