Clara Vine T1 – Les roses noires – Jane Thynne

Jane Thynne - Clara Vine T1 - Les roses noires (2015)

Jane Thynne – Clara Vine T1 – Les roses noires (2015)

blognote 3

4ème de couv’

1933. Clara Vine, jeune et jolie actrice anglaise pleine d’ambition, décide de partir tenter sa chance à Berlin, sur les conseils d’un ami.
Elle découvre alors les studios mythiques de l’Ufa et se retrouve rapidement coincée dans le cercle des femmes des hauts dirigeants nazis, dont la petite amie de Goering, Emmy Sonnemann, et l’impressionnante Magda Goebbels.

Lorsque Leo Quinn, agent sous couverture travaillant pour le renseignement anglais, rencontre Clara, il voit en elle la recrue idéale. En effet, déterminée à agir contre ses nouvelles relations, Clara Vine n’hésite pas à jouer de ses dons d’actrice pour les espionner et recueillir leurs confidences intimes, incarnant son rôle à merveille en dépit du danger.

Mais lorsque Magda Goebbels lui révèle un lourd secret et lui confie une mission des plus délicates, toutes ses certitudes basculent. Tiraillée entre son devoir, son affection grandissante pour Leo et le service que Magda lui demande, Clara va se retrouver confrontée à un choix difficile…

Mon ressenti de lecture

Cette série dormait depuis un moment dans ma PAL et j’ai eu envie de la dépoussiérer pour découvrir la plume de Jane Thynne et rencontrer Clara Vine.

Clare Vine est une jeune femme d’une bonne famille anglaise et, sur un coup de tête, pour échapper à un avenir que les hommes auraient voulu tracer pour elle, elle décide de tenter sa chance à Berlin pour que sa carrière d’actrice prenne son envol.
Mais nous sommes en 1933 et ce choix, Clara Vine, se demande s’il est judicieux lorsqu’elle prend la mesure de l’emprise des nazis dans tous les domaines.
Et a-t-elle choisi la meilleure solution pour échapper à la pression masculine?

Oui, Jane Thynne est la veuve de Philip Kerr, le papa du mythique Bernie Gunther. Oui, Jane Thynne écrit sur la même période historique: l’Allemagne du IIIème Reich. Et j’arrête là toute comparaison inévitable. Cela devait être pratique de partager la documentation historique de leurs romans mais non, Jane Thynne n’est pas un clone de Philip Kerr, elle a su développer son propre style.

Elle dresse une chronique sociale allemande dans les années 30 quand les nazis opèrent en force pour contrôler tous les aspects de la vie quotidienne. La traque des juifs s’intensifie, leur fuite également. Interdictions et obligations fleurissent et c’est la vie de chaque allemand qui s’en trouve bouleversée.

Le roman est formidablement documenté et j’ai vraiment eu l’impression d’arpenter les rues du Berlin de cette époque tant les descriptions sont précises.
On ressent très bien l’ambiance de peur et d’angoisse qui s’insinue lentement dans le quotidien allemand et l’obscurité qui enveloppe peu à peu chaque couche de la société.
Avec Clara, dès son arrivée à Berlin, notre regard s’éteint au fur et à mesure que ses yeux se dessillent alors que la rage du lecteur qui connaît la suite des événements historiques bout intérieurement.

L’évolution des pensées et la prise de conscience de Clara sont lentes et subtiles, au fur et à mesure qu’elle apprend à réellement observer et écouter et ne pas se contenter des apparences. La distance qui était la sienne à son arrivée s’évanouit lorsqu’elle découvre quelques secrets sur sa famille: la sympathie de son père pour les nazis, les origines de sa mère.
Elle est venue à Berlin pour travailler et acquérir davantage de liberté mais au fil des pages, on s’aperçoit que ce ne sera pas facile, pas au prix de certaines concessions, et qu’une nasse se referme sur la jeune femme.

Sa rencontre avec Leo marque un revirement dans sa vie et Clara s’engage dans une voie clandestine et dangereuse. Briller en société et œuvrer dans l’ombre.
Leo voit défiler de plus en plus de personnes en quête du Saint Graal, un visa pour quitter l’Allemagne. Du matin jusque tard le soir, les files d’attente ne cessent de s’allonger. Leo est sombre et réservé. Il a une vue globale des conséquences de l’ascension vertigineuse des nazis.
Et les journalistes qu’il côtoie sont aussi fébriles que lui. Ils sentent la guerre arriver mais subissent les pressions de leurs patrons pour ne pas altérer l’image du pays.

L’aspect « espionnage » (pardon Leo, je corrige « collecte d’informations ») met du temps à démarrer. Le danger et les risques ne s’intensifient que vers la fin. C’est une premier tome, donc ce n’est guère gênant mais j’espère que les prochains seront plus angoissants et captivants.

J’ai beaucoup aimé les personnages principaux, Clara et Leo, tout comme certains personnages secondaires qui apportent un éclairage diversifié sur ce qu’était l’Allemagne de 1933. Entre la haine des juifs ou des communistes, l’auteur pose les bases des relations internationales des années 30 au lendemain de la crise de 1929. Parfois contradictoire ou avec des accointances que l’on pourrait qualifier a posteriori de honteuses, flirter avec le nazisme jetait le trouble sur les politiques des vainqueurs de 14-18.

Le talent de Jane Thynne réside également dans le point de vue féminin sur cette période et le danger de l’ascension du nazisme pour la femme.
Nous nous écartons ainsi de la géopolitique pure et des velléités guerrières d’Hitler pour appréhender l’impact sur les femmes de cette prise de pouvoir. Réduire la femme à une procréatrice pour pondre toute une flopée de beaux bébés aryens vagissants, l’enfermer entre les murs de son foyer, lui interdire le travail, lui donner une prime pour se marier et surtout, ne pas oublier d’envoyer chaque jeune adolescente dans des camps de travail et d’apprentissage de son futur rôle! De véritables usines d’endoctrinement pour créer les allemandes nazies lobotomisées du IIIème Reich.
Un peu d’humour dans ce monde de fous: les nazis souhaitaient gommer toute beauté et sensualité dans la mode vestimentaire de leurs épouses mais courraient après les belles actrices séductrices… Contradiction masculine, quand tu nous tiens! Et quelque part, cette idée rétrograde de la femme n’a jamais été le monopole des nazis et revient même en force inquiétante de nos jours, oui, au XXIème siècle. Ceci n’est qu’une parenthèse…

L’auteur navigue avec aisance dans le monde de la mode et le milieu artistique de la création cinématographique. On mesure le côté superficiel de la chose au sein du drame qui se prépare mais donne aussi la mesure de l’outil de propagande qu’ils représentent. Les grands noms du cinéma en noir & blanc hantent les pages du roman, on hume le parfum Channel au détour des couloirs et on s’émerveille des bas de soie… La nostalgie d’une classe et d’une élégance devenues tellement rares de nos jours…

Cette rencontre avec Clara Vine est un voyage dans le temps au fil d’une chronique quotidienne de la vie berlinoise du IIIème Reich. Le roman est riche, résolument féminin et prometteur pour les dangers à venir. Et malgré un rythme un peu lent à mon goût, l’immersion dans cet univers est totale et je suis impatiente de connaître la suite…

Citations

« Vous constaterez, je pense, que tout est politique en Allemagne actuellement. Même les actrices. »

« À mon avis, un uniforme est une façon de se donner des airs. Comme un acteur portant un costume. On oublie ainsi ce qu’il est en dessous. »

« Ce n’était pas un hasard si les nationaux socialistes adoraient l’opéra. C’était vraisemblablement la seule forme artistique suffisamment bruyante pour couvrir les cris de protestation dans la rue. »

« Quel genre d’homme lui plaisait? Si l’on avait posé la question à Marie dix ans plus tôt, elle aurait répondu sans hésiter, un homme tout droit sorti de Jane Austen en passant part Charlotte Brontë. Un homme capable d’être intelligent, sensible et simple en même temps. Trouver les trois réunis était aussi dur que de gagner à une machine à sous …. »

« Il flottait sur la ville comme un gaz toxique, s’infiltrant à travers les portes fermées. Il y avait des arrestations, bien souvent sans aucune raison apparente, et l’on pouvait voir, à l’aube, des hommes encore abrutis de sommeil grimper en trébuchant dans des véhicules de police. Leo observait tout cela avec un désespoir croissant. C’était comme être prisonnier d’un rêve paralysant où vous regardiez la catastrophe vous engloutir peu à peu, sans pouvoir rien faire pour l’en empêcher. »

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Retrouvez mon avis sur les précédents tomes de la série Clara Vine dans la bibliographie de Jane Thynne, ICI!

The Bear Memoria

11 réflexions au sujet de « Clara Vine T1 – Les roses noires – Jane Thynne »

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