L’homme qui haïssait le bien – Sébastien Bohler

Sébastien Bohler - L'homme qui haïssait le bien (2017)

Sébastien Bohler – L’homme qui haïssait le bien (2017)

4ème de couv’…

Le crime était une maladie.
On a découvert le traitement.

Qu’y a-t-il dans la tête de Franck Corsa, le psychopathe le plus dangereux de France?

Pour la première fois, grâce aux progrès fulgurants de l’imagerie cérébrale, quelques scientifiques peuvent le savoir. Ils proposent alors un marché au prisonnier: effacer les causes du mal dans son cerveau par une opération chirurgicale jamais tentée à ce jour.

Lorsque Corsa se réveille, il n’est plus le même homme. Bonté, compassion, douleur: toute une gamme de sentiments humains lui est brusquement révélée.

Seul problème: être un homme bon ne faisait pas partie de ses plans.

Mon ressenti de lecture…

Comme d’habitude, tout d’abord, je remercie NetGalley et les éditions Robert Laffont pour l’envoi de ce roman dont la 4ème de couv’ était prometteuse.

Dans le cadre d’une nouvelle loi de santé pénale, des psychopathes emprisonnés pour de lourdes peines seront des cobayes humains expérimentant l’implantation de cellules souches censées « réparer » les neurones à l’origine de leurs déviances ou palier à leur absence.

Dès les premières pages, je suis gênée…
En effet, pour les personnes qui n’auraient pas lu Neuroland, dont je fais partie, il est un peu agaçant de voir passer des rappels de ce roman par bribes alors qu’il eût été si simple d’ajouter un paragraphe ou deux, dès le départ, pour que le lecteur ne se sente pas en dehors du coup et reconnecte les liens entre les uns et les autres.
Le fameux Franck est bardé de pansements mais pourquoi, on ne sait.
Maria est une survivante traumatisée mais j’ai tiqué à chaque fois qu’elle appelle son bourreau par son prénom, comme un membre de la famille.
Il y a eu le scandale Transparence mais quid? Rien n’est clair pour le lecteur.
Dommage. Cela n’enlève pas grand chose à la compréhension de l’intrigue présente mais c’est agaçant.

Si on s’en tient exclusivement à la 4ème de couv’ accompagné du titre, le lecteur s’attend à un thriller médical  avec une forte dose de psychologie, une dualité chez le personnage censé être principal entre ce qu’il a été, un monstre amoral, et ce que l’expérimentation médicale lui aura apporté, la « normalité ».
Or, à mon sens, le sujet est survolé.
Est-ce dû au fait que je n’ai pas lu les horreurs qu’il a commises dans Neuroland et qu’ainsi je n’ai pas su faire la différence entre avant et après?
Je ne pense pas car nous ne partageons que très très peu ce que Franck peut ressentir dans sa tête et ses pensées.
Je reste sur ma faim.
Un manque de profondeur sur cette expérience médicale enlève toute dimension propre à la révolution annoncée supposée « guérir » les psychopathes.

Très rapidement, je me suis dit que l’auteur a été trop ambitieux en essayant de mener de front un thriller médico-psy, un scandale politique, avec au milieu des espions, des terroristes et une pauvre tribu nicaraguayenne victime de sa pauvreté.
La trame de base avait du potentiel, l’intrigue se voulait riche, dense et passionnante. Mais aucune ramification de cette intrigue n’est, à mon sens, suffisamment travaillée pour apparaître totalement crédible et donc, addictive.

400 pages, c’est insuffisant pour exploiter efficacement tous ces thèmes. Le résultat semble par conséquent bâclé et l’auteur utilise des raccourcis douteux.
Par exemple, quant à la présentation du projet de loi, son adoption éclair et simpliste prêtant pourtant à polémique (et je n’ai même pas vu passer sa promulgation!).
Quant aux autorisations d’essais cliniques sur les êtres humains alors que la recherche effleure à peine certaines découvertes dans le domaine (les tests sur animaux sont zappés: enfin une victoire pour les défenseurs de la protection animale?).
Pas une seule fois il n’est question du Comité Consultatif National d’Éthique, le CCNE, indépendant de toute autorité de tutelle, en matière notamment des problèmes soulevés par l’utilisation et le commerce des cellules souches et de l’expérimentation sur l’Homme.
L’avocat de Dylan, un condamné éligible au programme d’implantation ne remplit absolument pas son rôle de conseil auprès de son client et ne lit même pas la totalité du « contrat »! (tu signes et tu es libre! Zou!)
L’auteur parle de « délit » alors qu’il est question de crime. Oui, je sais, déformation professionnelle, mon côté juriste se rebelle!
Et connaissant l’enfer administratif de notre pays, la chaîne d’autorisations, financements et contrôle de la mise en place de cet essai médical par un organisme privé semble totalement incohérent!
Je vous annonce également que les gardiens et flics chargés d’un transfert de prisonnier ne sont pas fichus de vérifier leurs armes pour s’apercevoir qu’elles sont chargées à blanc, hein! (Mais la mort, elle, est bien réelle!)
J’avoue qu’avec toutes ces approximations ou incohérences, la lectrice que je suis est tombée de son fauteuil à plusieurs reprises!

En ce qui concerne les personnages, je n’ai pas ressenti d’empathie.
Même pour Marie, la survivante ayant connu d’effroyables souffrances trop brièvement évoquées pour avoir une quelconque portée de compassion et qui, comme ça, d’une minute à l’autre, avec quelques mots, se retrouve libérée de ses blocages. C’est un peu fort et peu crédible! Et elle est tellement présente à chaque étape du processus qu’elle en devient lourde!
Même réflexion pour les autres personnages, trop peu fouillés voire insignifiants.
Il n’y a guère que le passage au Nicaragua qui aura suscité quelques émotions, avec ses jeunes filles exploitées et meurtries pour la seule cupidité d’un malfrat sans scrupule.

L’auteur avait tous les éléments pour écrire un roman époustouflant mais, à trop vouloir en faire, il n’aura pas atteint le but de me captiver. Je ne suis pas convaincue et je suis restée sur ma faim. Dommage…

Citations…

« Nous serons le pays qui change le criminel en malade, et le détenu en patient. Le pays qui soignera les pathologies au lieu de punir des délits. Le pays qui remplira des hôpitaux et videra des prisons. »

« Ton peuple doit quitter ce territoire maudit des dieux. Quand un fleuve saigne, c’est la terre qui exprime le mal que les hommes lui ont fait. »

« (…) il retrouvait cette étincelle d’inspiration propre aux grands esprits, ce contact intime avec les concepts qui l’élevait au-dessus des contingences humaines. On voyait alors des molécules danser dans ses yeux, des concepts s’animer, et comme des équations s’écrire dans l’air. »

« Passé l’éclair de compassion, il y avait de nouveau dans ce regard une dureté implacable. Une haine mécanique, bestiale, une carapace qui enfouissait tous les bons sentiments, les tordait et les noyait dans des océans d’acier fondu. Quoi qu’il fût apparu pendant quelques secondes dans ce cœur, cela y avait été muré, écrasé, étouffé et réduit en charpie. »

« Incrédule, le garde contempla le canon de son arme, comme un enfant dont le jouet ne fonctionne pas. »

Note: 3/5

Blog Note 3

25 réflexions au sujet de « L’homme qui haïssait le bien – Sébastien Bohler »

  1. Il est dans ma PAL et j’avoue que j’hésite à le lire, alors que le 4ème de couv fait très envie,parce que je n’ai pas lu Neuroland! Je pense que je vais prendre mon temps et commander le 1 avant d’attaquer celui-ci 😉

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